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Par Union.fr

La prostitution en France : un flou juridique dangereux ?

Par | 29 avril 2022

La situation des prostituĂ©es en France fait l’objet de nombreux dĂ©bats : lĂ©galisation ? Interdiction ? Quelles sont les consĂ©quences de cette indĂ©cision ? On vous explique !

Une situation floue

Il existe 4 modèles législatifs sur la prostitution dans le monde :

  1. La prostitution lĂ©gale : Pays-Bas, Mexique et certaines rĂ©gions d’Australie et des Etats-Unis comme le Nevada)
  2. La prostitution tolérée mais non-encadrée : Belgique, Pologne, Japon, Inde ou Argentine
  3. La prostitution illégale mais où seuls les clients sont sanctionnés : France, Canada, Suède ou Norvège
  4. La prostitution illégale pour tous : Russie, Chine, Egypte (les autres Etats Américains)

La France sanctionne uniquement le client (par une amende de 1500 euros). Ce dispositif n’empĂŞche donc pas rĂ©ellement la prostitution tout en ne l’encadrant pas : consĂ©quences ? Un double impact nĂ©gatif pour les praticiennes du sexe.

Samantha, une prostituée, expliquait pour France info ses conditions de travail compliquées et dangereuses :

  • La baisse de client : Â« Ă‡a devient très compliquĂ©. Ă‡a m’arrive de faire l’aumĂ´ne pour manger. Ă‡a m’arrive parfois de faire un, voire deux clients par mois. »
  • La hausse des risques : « Les clients nĂ©gocient, demandent sans capote etc. Ils sont plus violents. Du fait de la pĂ©nalisation du client, ils estiment que comme ils sont plus rares, que l’on fait moins de passes et que l’on gagne moins d’argent, on n’a pas d’autre choix que de les accepter»

La dangerositĂ© de la profession se confirme dans les chiffres. Selon Ă©galitĂ©-femmes-hommes.gouv, 38% des femmes dans ce milieu ont subi un viol et 29% d’entre elles auraient des pensĂ©es suicidaires.

VĂ©ritable marchĂ© noir, la France compte entre 30 000 et 50 000 prostituĂ©es dont 93% sont Ă©trangères. Entre 7 000 et 10 000 mineurs seraient concernĂ©es par la prostitution…

L’abolition : la solution ?

Avec un tel bilan, des associations tentent de faire abolir la prostitution. « Le mouvement du Nid« , par exemple, dispose d’un programme de rĂ©insertion qui depuis 2017 a aidĂ© 161 pĂ©ripatĂ©ticiennes Ă  trouver un CDI.

L’inconvĂ©nient de l’abolition ? Elle n’arrĂŞte pas rĂ©ellement la prostitution. L’interdiction du commerce sexuel lĂ©gal permet l’Ă©mergence de marchĂ© noir. Au Japon, par exemple, une loi interdisant strictement la pratique avait Ă©tĂ© signĂ©e en 1956. Depuis, deux raisons ont poussĂ© l’Etat Ă  ĂŞtre moins sĂ©vère et Ă  encadrer d’avantage la profession :

  • La crĂ©ation de marchĂ© noir et de rĂ©seaux clandestins : au sein duquel les conditions de travail, d’hygiène, d’âges (la prostitution d’adolescentes scolarisĂ©es notamment) et de consentements n’Ă©taient pas toujours respectĂ©es.
  • Une perte d’argent : lĂ©galiser un marchĂ© revient Ă  percevoir des taxes. L’Etat japonais a pu constater que mĂŞme en interdisant la pratique, un marchĂ© parallèle s’organisait. Alors si la prostitution doit obligatoirement exister, autant l’encadrer et percevoir des taxes (19 millions d’euros en 2009)

La légalisation : la solution ?

La lĂ©galisation de la prostitution permettrait d’amĂ©liorer drastiquement les conditions de travail des pĂ©ripatĂ©ticiennes. Deux exemples viennent confirmer l’importance d’un cadre lĂ©gal.

« Le capotier » distributeur de sécurité

Le capotier ou Jérôme Bénozillo a créé un service de livraison de préservatifs pour les prostituées dans la région lyonnaise.

Après avoir Ă©chouĂ© dans la vente de capotes Ă  des buralistes, M. BĂ©nozillo s’Ă©tait tournĂ© vers celles qui en auraient le plus besoin :  Â« Alors je me suis dit que j’allais les donner Ă  celles qui en avaient le plus besoin. Puis une fille m’a demandĂ© si je pouvais lui en vendre ! Â»

D’autres produits complètent les ventes du Capotier : du lubrifiant, des lingettes, des serviettes, etc. Le livreur de sĂ©curitĂ© participe au confort physique et moral des professionnelles du sexe :  Â« Ce n’est pas banal d’avoir passĂ© presque 20 ans chez les prostituĂ©es. Je m’y accroche, Ă  ces nanas. J’ai bien sympathisĂ© avec nombre d’entre elles, on a passĂ© des moments extraordinaires. Elles ont des histoires incroyables. Je suis content du rĂ´le social que je joue. Â»

Malheureusement, après 20 ans de bons et loyaux services, Le capotier se retirera au maximum en 2023 et n’a toujours pas trouvĂ© de remplaçant. Actuellement, il est le seul distributeur de prĂ©servatif de France…

Au cours de sa carrière JĂ©rĂ´me BĂ©nozillo a constatĂ© la violence faites aux professionnelles et a mĂŞme Ă©tĂ© agressĂ© Ă  plusieurs reprises : « Quand je faisais des tournĂ©es de nuit, je scrutais mes rĂ©troviseurs. Plusieurs fois, j’ai vu des voitures qui me suivaient. Les filles ne me paient qu’en cash, alors forcĂ©ment. Â»

Cette situation n’existerait pas si un cadre lĂ©gal Ă©tait dĂ©ployĂ© comme aux Pays-Bas.

Une innovation aux Pays-Bas

Les Pays-Bas ont légalisé la prostitution depuis 2000 et ce cadre légal permet de mieux sécuriser les professionnelles.

Le site Ugly Mugs NL (sale tĂŞte Netherlands) permet aux prostituĂ©es de dĂ©noncer des clients agressifs. Ils seront alors fichĂ©s dans l’application et cela offrira l’opportunitĂ© aux vendeuses de gĂ©olocaliser un client dangereux non loin d’elles ou d’avoir accès Ă  l’historique d’un client afin de ne pas prendre rendez-vous avec (s’il prĂ©sente des antĂ©cĂ©dents).

La légalisation : une solution miracle ?

La légalisation comporte de nombreux avantages :

  • Des avantages pratiques : des meilleures conditions de travail et d’hygiène.
  • Des avantages sociaux : la prostitution serait reconnue comme un vrai mĂ©tier et les professionnelles pourraient cotiser pour la retraite, prĂ©senter des fiches de paies pour un prĂŞt (problĂ©matique soulevĂ©e par le film Une femme du monde)
  • Des avantages financiers : avec un mĂ©tier officiellement reconnu, les Ă©tablissements devraient payer des taxes, les praticiennes payeraient des impĂ´ts, etc.

En 2013, FrĂ©dĂ©ric Beigbeder et Nicolas Bedos, entre autres, signaient « Le manifeste des 343 salauds Â». Le texte appelait Ă  la règlementation du secteur et condamnait le proxĂ©nĂ©tisme. Le manifeste relevait entre autres l’absurditĂ© de condamner un client d’une pratique non interdite : « Punir ce qui n’est pas interdit, ça laisse rĂŞveur. Â»

La lĂ©galisation prĂ©sente des avantages majeurs mais n’efface pas non plus totalement les inconvĂ©nients.

Les Pays-bas, oĂą la prostitution semble ĂŞtre la mieux encadrĂ©e au monde, voient augmenter les victimes de violences et le dĂ©veloppement du marchĂ© noir. Les chiffres restent bien infĂ©rieurs de ceux afficher ailleurs en Europe mais ils restent tout de mĂŞme alarmant. 3 000 mineures se prostitueraient illĂ©galement aux Pays-Bas soit (minimum) 4 000 de moins qu’en France.

La lĂ©galisation a permis de rĂ©duire le nombre de prostituĂ©es Ă©trangères passant de 80% en 1999 Ă  60% en 2009. Une baisse importante mais qui ne reprĂ©sente pas pour autant une disparition de l’exploitation sexuelle des migrants.

Il n’existe donc pas de solution miracle pour empĂŞcher les marchĂ©s noirs. Si les opinions divergent entre ceux pour l’abolition et ceux pour la lĂ©gislation, les deux camps possèdent une opinion commune : changer la loi en France et vite !

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